Qui est vraiment Dhul-Qarnayn ? 3/3
Qui est vraiment Dhul-Qarnayn ? Histoire & recherche méthodologique 3/3
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La théorie de l’ « Acte fondateur »
Voyons maintenant comment le Coran interprète et explique les répétitions des schémas historiques et les ressemblances qui existent entre diverses époques et récits biographiques.
J’ai déjà expliqué sur la base de la traduction de la Tadmurriya (Lettre palmyrienne) que la différence majeure entre la pensée islamique et la pensée occidentale est la définition du rapport entre la réalité et le langage[1]. Dans la philosophie occidentale, le langage précède la réalité : c’est-à-dire qu’elle considère que des concepts guident la réalité. A partir de l’observation de la réalité, on en induit des lois immuables qui existent de toute éternité. Alors qu’en Islam c’est l’inverse : le langage arrive après la réalité dans l’ordre des choses, pour la décrire a posteriori. Le monde n’est pas régi par des règles formulées conceptuellement à l’avance, mais par des Sunan, des « précédents historiques », des « actes fondateurs », qui sont des actes concrets et non des principes formulés.
Ces Sunan sont ensuite répétées dans le temps, par d’autres acteurs qui « prennent exemple » sur les fondateurs et s’inscrivent alors dans leur tradition, leur paradigme. Ce n’est que dans un troisième temps que le langage intervient sous la forme d’un discours « scientifique ». Les penseurs ont pour tâche de formuler une loi à partir de l’observation de la répétition de ces événements. En Islam, la réalité n’est donc pas régie par des lois abstraites, mais par des actes fondateurs qui font en quelque sorte « jurisprudence ». Les lois et les théories ne viennent que bien après dans le temps, afin d’exprimer et refléter ces « traditions ».
Pour bien comprendre la différence entre ces deux approches, prenons un exemple concret et significatif : en Occident on crée un modèle social, juridique ou politique en formulant des principes et des règles abstraites qui sont ensuite mises en application par des acteurs politiques. Il a fallu d’abord que des philosophes comme Hobbes, Locke, Rousseau, Montesquieu et autres théorisent le contrat social, la séparation des pouvoirs, etc. avant que des dirigeants, activistes politiques et révolutionnaires mettent ensuite en application ces idées en créant un modèle de société conforme à ces principes, avec les révolutions anglaises, françaises et américaines.
Ici, la théorie précède la pratique : la formulation des principes est antérieure à leur mise en application. En revanche, en Islam, il s’est produit l’exact inverse : le Coran et les hadiths énonçaient des actes concrets à accomplir dans un contexte particulier. Dans un deuxième temps, les « suiveurs/successeurs » (tâbi’ûn) ont fait vivre ces actes par l’imitation, s’inscrivant ainsi dans la « tradition » prophétique (Sunna). Ce n’est pas en édictant des règles abstraites que le modèle islamique a pris corps, mais par l’exemple.
Ce n’est que dans un troisième temps que des fuqaha musulmans ont codifié sous forme de règles et de principes abstraits le droit musulman (fiqh), donnant une forme « langagière » à l’Islam. Et c’est plus tard encore que d’autres théoriciens ont poussé l’abstraction de plus en plus loin, en édictant les règles de droits (qawâ’id) qui encadrent la jurisprudence, puis les fondements du droit (usûl) pour terminer plus tardivement avec les finalités supérieures (maqâsid) qui représentaient jusqu’à maintenant le plus haut niveau d’abstraction du modèle juridique musulman.
Pour terminer : c’est à notre époque, grâce à l’utilisation des concepts occidentaux, que nous pouvons désormais définir la forme la plus abstraite de l’Islam, en énonçant par le langage les principes fondamentaux de l’Islam[2]. On voit avec cet exemple que l’Islam donne au langage la fonction de refléter a postériori la réalité concrète, et non de régir à l’avance la réalité comme le fait la philosophie. C’est à ce titre que je disais que le renversement de la relation Réalité/Représentation opérée par la philosophie grecque il y a 2500 ans puis contestée par l’Islam il y a 1400 ans, est la base de toutes les autres divergences entre l’Occident et l’Islam.
Cette relation entre langage et réalité s’applique également au domaine historique. Il y a ici deux manières de concevoir le fonctionnement de l’Histoire. Soit on considère que les principes abstraits précèdent la réalité, que les événements historiques suivent des règles préétablies, soit on considère que la réalité précède les principes abstraits.
Or, l’Islam professe clairement la deuxième vision, en enseignant que l’histoire humaine est régie par des « actes fondateurs », des Sunan (qui sont donc des actes concrets et non des règles abstraites), qui sont ensuite répétés à petite échelle sur le modèle du précédent historique. La formulation théorique n’intervient que dans un troisième temps pour les « représenter ».
Cette approche met en exergue les similarités entre les époques, car il existe effectivement dans l’histoire une répétition, non pas des événements, mais des Sunan. L’Islam interprète ces ressemblances comme des répliques d’un acte fondateur. D’ailleurs, l’une des fonctions du Texte révélé est d’évoquer ces Sunan. Les grandes Sunan sur lesquelles reposent les cycles de l’histoire humaine sont instituées par Dieu : c’est le cas du « châtiment des peuples criminels », c’est-à-dire des calamités qui frappent les sociétés qui rejettent le message des prophètes.
En l’occurrence, l’acte fondateur est le Déluge qui a anéanti le peuple de Noé. Dans la suite de l’histoire, les peuples dénégateurs qui rejetèrent leurs prophètes, subirent les « répliques » du précédent historique diluvien. La répétition de ces événements et la ressemblance entre ces divers cataclysmes à des époques diverses s’expliquent par la relation « précédent historique »/« répliques ».
Nous avons vu que l’« analogie corrélative » consiste à fusionner divers récits du fait de leurs ressemblances. Le Coran oppose à cette méthode l’« analogie déductive », appelée qiyâs bi-al-‘illa par les théoriciens du droit musulman (usûliyûn), (Le Califat d’Adam, p.52)[3]. L’« analogie déductive » consiste à attribuer aux « répétiteurs/suiveurs » le même statut (hukm) et le même destin (‘âqiba) que le fondateur dont ils ont imité l’action. La méthode déductive appliquée à l’histoire est exposée en toute clarté dans ces deux versets :
{Ceux qui les ont précédé disaient la même chose qu’eux, mais leurs richesses ne leur furent d’aucun secours * ils furent punis pour les méfaits qu’ils commirent, alors ceux-là seront punis pour les méfaits qu’ils commettent} (Coran 39.50-51).
On voit que ce passage du Coran fonctionne selon les mêmes procédés déductifs que l’on retrouve en théorie du droit (usûl al-fiqh) :
1- « Ceux qui les ont précédé dans le mensonge » sont les fondateurs. Il s’agit de la situation d’origine (al-Asl)
2- « La punition qu’ils subirent pour leurs méfaits » était la conséquence de leurs actes. Il s’agit de leur « statut » (hukm)
3- Or, les contemporains en « commettant les mêmes méfaits » suivent l’exemple des premiers. Il s’agit du point commun : al-‘illa.
4- Par déduction, leur statut sera identique à leurs prédécesseurs : ils subiront les mêmes conséquences. Il s’agit du « statut équivalent » (far’).
C’est au nom de cette méthode déductive que le Coran incite les croyants à remarquer à travers l’histoire que le destin des nations coupables est toujours identique, car la répétition de la même action amènera à la répétition de la même conséquence :
{Observe quel fut le sort tragique –‘âqiba- des criminels} (Coran 7.84) ; {Vous ne trouverez aucun changement dans la Coutume (Sunna) divine} (Coran 17.77).
Les fondateurs dans le Coran
Les histoires des Prophètes sont exposées dans le Coran car ce sont les plus grands « fondateurs » de l’Histoire. Il suffit de voir comment le prophète Dâud (David) est encore pris en exemple par les monarchies européennes (actuellement anglaise) qui se réclament de son héritage et de son modèle, ou que, même devenus athées, les occidentaux citent toujours en exemple la « justice de Salomon » et « la charité de Jésus ». Ainsi, le Coran nous apprend qu’Adam est le premier humain à avoir accompli la « demande d’absolution » (al-istighfâr) (Coran 2.37) et qu’il est donc le fondateur de cette pratique. Les croyants de toutes les époques qui font l’istighfâr s’inscrivent dans sa Sunna.
Le prophète Ibrâhîm (Abraham) est évoqué dans le Coran comme le fondateur du principe de « communauté de croyance » (Milla, walâ). Alors que les prophètes antérieurs étaient considérés comme l’un de leur peuple même si ce dernier les rejetait, Abraham est le premier prophète à faire correspondre sa foi et son appartenance sociale et communautaire. Ne partageant pas la même foi que son peuple, il se désavoue d’eux et ne se considère plus comme appartenant à leur communauté (Coran 60).
Il est alors le fondateur d’une « communauté » (oumma) autonome de croyants. C’est ce qui explique l’intérêt historique pour nous, de réétudier les actes des prophètes pour comprendre l’histoire humaine dans toute sa profondeur, et surtout pour interpréter notre présent à la lumière de ces précédents historiques. C’est en décelant les similarités entre notre époque et celle des prophètes, que nous trouverons le modèle et la voie à suivre.
L’Islam fonctionne donc par « jurisprudence » et non sur une constitution préétablie : c’est en calquant l’exemple (Sunna) du Prophète, que les musulmans déterminent leur propre action. Par extension, c’est en suivant l’exemple des prophètes, que les musulmans doivent déterminer à chaque époque, leurs orientations civilisationnelles et historiques. C’est précisément la méthode que j’ai tenté de respecter dans « la voie des Nazaréens ». A partir du constat de l’exacte similarité entre les courants musulmans de notre époque et les sectes juives à celle de Jésus, j’en ai conclu que la voie à suivre de nos jours devait se conformer à la sienne.
Mais le Coran cite également les « fondateurs » qui n’étaient pas des prophètes, des hommes exceptionnels, bons ou mauvais, qui ont institué des Sunan, répétées par la suite par des « imitateurs ». Ainsi, le fils d’Adam, Qabîl, qui tua son frère, est le premier « assassin » de l’histoire. Il est donc le « fondateur » de cet acte et tous les assassins qui viennent après lui s’inscrivent dans sa Sunna. C’est en tant que fondateur qu’il devra répondre de l’acte de tous ses « successeurs » : « Chaque fois qu’une personne est tuée injustement, le fils d’Adam (Caïn/Qabîl) porte une part de ce sang, car il est le premier à avoir institué (sanna) le meurtre »[4].
Ou le peuple de Loth qui inventa la pédérastie : {Et lorsque Loth dit à son peuple : « commettez-vous une ignominie que nul avant vous n’avez osé pratiquer ? »} (Coran 7.80). On peut aussi donner l’exemple de Pharaon qui est cité tant de fois dans le Coran en tant que premier humain à s’être auto-divinisé. Il est en cela le précurseur du césarisme romain : c’est au contact de la dynastie ptolémaïque d’Egypte que les empereurs romains, César puis Auguste, instituèrent l’apothéose ou divinisation de l’empereur et importèrent en Europe ce mode de gouvernance.
Les actuelles idéologies politiques occidentales s’inscrivent elles aussi dans la Sunna de Pharaon, car elles ont divinisé l’Etat, le « dieu sur Terre » selon les termes de Thomas Hobbes, théoricien de l’Etat moderne (Le Léviathan).
Dhul-Qarnayn, le fondateur
Voyons maintenant comment interpréter le récit de Dhul-Qarnayn à la lumière de la théorie coranique de l’acte fondateur. Nous avons vu que l’approche corrélative « occidentale » consistait à relever les similitudes entre la sourate 18 du Coran et des récits légendaires ou historiques, et déduire arbitrairement soit leur équivalence (« Dhul-Qarnayn est Alexandre »), soit un rapport de causalité (« le récit coranique de Dhul-Qarnayn est la copie d’un récit syriaque »).
En réalité, le Coran évoque ce roi, Dhul Qarnayn, en tant que fondateur, initiateur d’une pratique qui a été répétée par la suite par d’autres souverains et empires. Le Coran nous apprend donc qu’au début du deuxième millénaire avant l’ère chrétienne, Dhul-Qarnayn fut le premier chef d’Etat à avoir cherché à préserver les zones de peuplement agricoles du « Midi » contre les agressions des peuples barbares nordiques, en élevant une muraille.
A travers le récit de ce conquérant, la Sourate 18 décrit en fait un « précédent historique » car la fabrication d’une muraille pour contenir la poussée des peuples eurasiens a été prise en exemple par les civilisations, empires et dynasties ultérieures, à commencer par les rois Perses qui ont âprement combattu les Scythes et ont élevé des murailles dans le Caucase et sur les bords de la mer Caspienne. Puis les empereurs chinois qui ont bâti et étendu pendant des siècles la célèbre muraille de Chine pour endiguer les invasions de ces mêmes « Barbares du Nord ».
Plus tard, les Romains ont élevé au cœur du continent européen les fameuses Limes pour contenir les invasions des peuplades germaniques. Alexandre de Macédoine, suivant l’exemple de ses prédécesseurs achéménides, a lui aussi bâti une muraille contre les mêmes peuplades d’Asie centrale : « (…) le mur d’Alexandre, qui était appuyé sur la Caspienne et couvrait l’Hyrcanie sur 180 kilomètres, fut finalement abandonné. »[5]. Alexandre de Macédoine n’était donc pas Dhul-Qarnayn, mais un souverain qui, parmi tant d’autres, s’est conformé à la Sunna de Dhul-Qarnayn.
Comme Cyrus, les rois de Chine, les empereurs romains, etc., il a perpétué sa politique bien des siècles après lui, en élevant des murailles pour protéger le « Midi » contre les invasions des peuples barbares eurasiens. Voilà ce qui explique l’origine de la confusion entre Alexandre et le « vrai » Dhul-Qarnayn. Tous ces empires se sont inscrits dans la tradition, le paradigme de Dhul-Qarnayn, ce qui explique les similitudes frappantes entre tous ces récits, sans qu’il faille en déduire une identité.
La question est identique en ce qui concerne l’expression « au deux cornes » / « bicornu ». En réalité, les deux cornes est un symbole ancien bien antérieur à Alexandre de Macédoine et au IVe siècle avant JC. Les cornes sont les symboles des stations solaires au matin et au soir : le soleil levant et le soleil couchant. Ce conquérant a certainement été surnommé ainsi car ses expéditions militaires ont atteint l’extrême occident et l’extrême orient.
C’est ensuite que ce symbole a été repris par d’autres souverains, à commencer par les autres rois de la dynastie himyarite puisque le code Hammourabi mentionne, dans son préambule, une ode au dieu soleil « vénéré de tous les peuples ». Dhul-Qarnayn, là encore, n’était qu’un fondateur. Il a été imité par d’autres qui ont conservé la connotation solaire des « deux cornes », mais en pervertissant le sens et en lui donnant une dimension polythéiste.
Les deux cornes sont devenues un culte solaire : l’adoration du soleil levant et du soleil couchant. Le code Hammourabi décrit d’ailleurs avec précision ces prosternations accomplies au lever du soleil :
« Lorsque tu apparais, Shamash [soleil], les peuples se prosternent. Tous les gens, de partout, s’inclinent devant Toi ! […] Tous sont prosternés devant Toi, et le cosmos entier, Shamash, aspire à Ta lumière ! »[6].
Plus tard, ces symboles sont passés de la Chaldée à l’Egypte. La culture égyptienne a repris ce symbole, comme la coiffe d’Isis qui est un disque solaire entouré de « deux cornes » qui signifient le culte rendu au soleil du matin. Ce culte solaire s’est ensuite diffusé dans le monde. C’est la raison pour laquelle le Prophète nous a interdit dans un hadith de prier le matin après le lever du soleil et les dernières heures avant son coucher, car les adeptes des cultes sataniques prient leur dieu soleil à ces horaires-là :
« Lorsque le soleil se lève, abstenez vous de prier car il se lève sur la corne du diable, et c’est là que les impies lui vouent un culte » et dans une autre version : « le soleil se lève entre les deux cornes de Satan et il se couche entre les deux cornes de Satan] »[7].
S’il est avéré qu’Alexandre de Macédoine se faisait appelé le « bicornu », il était loin d’être le premier et le seul à s’être approprié le symbole. Il n’a fait que reprendre un symbole ancien pour s’inscrire dans les récits légendaires. D’ailleurs, il est connu qu’Alexandre avait été bercé par les épopées des héros mythiques du passé et qu’il tentait, par ses conquêtes, d’égaler leurs exploits.
A.S. Al-Kaabî
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[1] https://editions-nawa.com/smartblog/9_Le-dieu-des-philosophes-est-il-le-Dieu-des-pr.html
[2] Je fais ici allusion à la formulation des deux principes fondamentaux de l’Islam : principe de non-contradiction et principe de non-équivalence.
[3] Je me réfère ici à l’ouvrage d’Ibn Qayyim qui fait référence dans ce domaine : ‘ilâm al-muwaqi’în. http://shamela.ws/index.php/book/11496
[4] Hadiths rapporté par Al-Bukhârî et Muslim, selon ‘Abdullah ibn ‘Amrû ibn al-‘Âs.
[5] Jean-Paul Roux. L’Asie centrale. p42
[6] Jean Bottéro, La plus vieille religion : en Mésopotamie. Folio, Paris, 1998, p. 82-83.
[7] http://library.islamweb.net/newlibrary/display_book.php?flag=1&bk_no=93&ID=59
Es-selèmou 3aleykoumLe premier homme qui s'est divinisé lui-même était Nemrod, connu des Juifs et Chrétiens pour avoir été "grand chasseur devant l'Eternel". Son nom lui-même est basé sur la racine sémitique "m.r.d", qui veut dire "rebelle", et que l'on retrouve dans le mot arabe "marid" qui désigne une catégorie de démons. Nemrod, roi de Babylone, s'opposa à Abraham en des termes qui montrent clairement qu'il se croyait être un dieu. Coran : « Abraham a dit : "J'ai pour Seigneur Celui qui donne la vie et la mort."."Moi aussi, dit l'autre, je donne la vie et la mort." Alors dit Abraham: "Puisque Allah fait venir le soleil du Levant, fais-le donc venir du Couchant." Le négateur resta alors confondu. Allah ne guide pas les gens injustes. » Or Pharaon, lui, s'opposa à Moïse, et ce dernier était postérieur à Abraham de plusieurs siècles.Pour ce qui est de l'identité de Dhoul Qarneyn, je penche plus pour Cyrus II, roi des Perses et des Mèdes, qui, contrairement à Hammourabi et Alexandre, était un authentique monothéiste, adorateur du dieu unique Ahura Mazda ("Seigneur de la sagesse") selon les rites enseignés par Zoroastre (même si le zoroastrisme vira au dualisme par la suite), conquit le monde alors connu de l'Est à l'Ouest, érigea un barrage, portait un casque à deux cornes. À mon sens, le meilleur argument en sa faveur, c'est la vénération que lui vouent les Juifs au point de l'avoir appelé "Messie du Seigneur," c'est-à-dire roi consacré par l'onction divine, notamment pour avoir permis le retour d'Israël dans son royaume et la reconstruction du Temple. C'est sans doute pour cette raison que les Juifs ont demandé à Mohammed (saw), pour le tester, s'il connaissait Dhoul Qarneyn. Je vois mal les Juifs, très centrés sur eux-mêmes, questionner le Prophète (saw) au sujet d'un homme qui n'est ni Israélite ni bienfaiteur envers Israël. Il suffit pour se rendre compte de l'israélo-centrisme du judaïsme rabbinique, déjà dominant dans l'Arabie du sixième siècle, qu'un juste ("tsedeq") n'est plus, comme en Islam, comme dans les Livres juifs, un monothéiste qui ne gâche pas son culte par l'injustice du polythéisme, mais simplement un bienfaiteur envers le peuple d'Israël, par exemple un homme ayant sauvé des Juifs de la déportation.Autre argument en défaveur de l'hypothèse d'un Dhoul Qarneyn contemporain d'Abraham est qu'à l'époque de ce prophète, l'écriture avait déjà été inventée pour consigner les faits historiques marquants ; or un roi, auteur de tels exploits parmi tant de peuples, aurait laissé des traces écrites et fait l'objet de récits transmis de génération en génération. L'époque d'Abraham est trop bien documentée pour que les hauts faits de ce roi ne nous soient pas parvenus. Ce qui renforce ma conviction, c'est que ces exégètes qui affirment que Dhoul Qarneyn est un contemporain d'Abraham ne sont mêmes pas capables de nous donner ni son nom, ni l'étendue de sa royauté, ni le lieu de construction du barrage, alors qu'il a marqué l'Histoire en subjuguant l'Orient et l'Occident. Ils nous laissent seulement avec l'information "roi contemporain d'Abraham" sans même nous donner la source de cette seule et unique information. À mon sens, Cyrus II reste le seul qui coche toutes les cases ; et l'exemple de Pharaon pour prouver que le Coran ne cite que ceux qui furent les premiers à avoir institué une bonne ou une mauvaise tradition, et par la même occasion que le roi amorite est le seul en droit d'être le Dhoul Qarneyn coranique, est un mauvais exemple, puisque Pharaon est cité plusieurs fois en tant qu'homme-dieu dans le Coran tout comme est cité Nemrod dans le Coran, alors que Nemrod, dit dans la Torah, est le premier homme ayant prétendu à la divinité.
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